Oser en marketing – Pourquoi pas !
Alors, pourquoi oser changer : mais parce que le consommateur change tout simplement.
Et cela encourage suffisamment pour revoir son positionnement, son offre, ses circuits de distribution, son approche client, sa communication, etc. D’autres n’y verrons pas de motivation, mais plutôt une obligation.
Avoir de l’audace dynamise l’approche commerciale et transforme des affaires tièdes en opportunités.
Par ailleurs, la chance de l’effet ‘’startup’’ actuel est que les entrepreneurs qui réussissent renchérissent à nouveau sur ce même terrain. Le retour qu’ils assurent en expertise, en financement, en mentorat bénéficie à l’écosystème. L’impact ainsi occasionné mène l’ambition à un niveau supérieur facilité par un accroissement d’audace. ‘’Think big’’, enfin !
1- Oser, c’est innover.
Sortir de la zone confortable de ce qui se fait dans son secteur d’activité pour dépasser les a priori, rester en prise avec le client, se maintenir dans la course tout simplement. Parfois, il s’agit d’innover pour devancer les attentes. Voyez Apple proposant au consommateur un produit auquel il ne s’attendait pas.
L’innovation n’est pas naturelle chez le plus grand nombre de managers et de marketeurs. Ce serait même le choix et l’action les plus difficiles, vu la rupture de modèle induite.
Pourtant, certains sont tout simplement nés avec. Des exemples évidents : Steve Jobs, Elon Musk, Bill Gates… entre autres.
A défaut, il est toujours possible de trouver le carburant de l’innovation et de s’en abreuver pour tenter l’évolution marketing. Il existe de nombreuses méthodes engageant sur la voie de l’innovation. En voici certaines.
♦ Stratégie de l’Océan bleu. Les nouveaux espaces stratégiques exploités par des visionnaires sont repérables. Ils provoquent des avancées singulières dans les méthodes marketing. Ces nouveaux espaces inexplorés sont les océans bleus. L’idée est de se donner l’opportunité de changer de regard sur son secteur pour en déceler de nouveaux critères de valeur. Cette mise en perspective appelle en général un repositionnement de l’entreprise. Le défi est de taille : chercher à créer et capturer un nouvel espace stratégique vierge de toute concurrence et imposer sa vision aux salariés, partenaires et public.
♦ Transformation digitale. Elle impacte tout le tissu économique, directement ou non.
Se digitaliser permet de mieux anticiper les attentes des consommateurs et donc d’attirer de nouveaux clients, de gagner en compétitivité et en productivité.
La révolution digitale implique de grands changements dans l’organisation et une vision de l’entreprise. Ces bouleversements ne se limitent pas à intégrer de nouveaux outils ou technologies digitaux. Il s’agit bien de provoquer réellement une révision de l’ensemble des fonctions, des sources de valeurs, de l’offre, du ciblage, du positionnement, etc.
Ce qui signifie que le modèle économique selon lequel l’entreprise assure son chiffre d’affaires et sa marge s’en trouve réexaminé. Rentrer dans l’ère digitale, c’est tenter de s’attaquer à la colonne vertébrale de l’entreprise : son business model. C’est transformer un cadre déclinant mais connu en un cadre salvateur mais inconnu. D’où le dilemme.
♦ Méthode agile appliquée au marketing. Dans une stratégie de marketing agile, l’objectif est de proposer à une cible une offre qui soit au plus près de son attente. La structure fonctionne alors en mode d’amélioration constante et généralement instantanée.
L’agilité est mise en place dans le partage et la communication entre les équipes en charge du projet, ainsi qu’avec les cibles. Par ailleurs, la capacité au changement se révèle dans la rapidité de remise en cause du projet et le prompt déploiement des opérations marketing et communication. L’ensemble devant pouvoir être à nouveau modifié, voire abandonné, si les résultats attendus ne sont pas atteints.
Voilà une grande évolution du marketing. La logique du ‘’test and learn’’ consiste à effectuer des essais sur la pertinence du support retenu. Mais, sans en avoir une grande visibilité. En outre, les résultats se mesurent parfois sur le long terme. La solution est de se fixer des objectifs réalistes et d’ajuster la stratégie selon les retours : maintenir les investissements, les augmenter ou les stopper.
Le risque est pris de démotiver les équipes, de faire et défaire une offre, d’épuiser ses ressources. En revanche, l’acquisition des retours d’expérience et de nouvelles compétences en interne n’a pas de prix.
Cet état de mise en question ainsi défini est plus souple pour une startup. Nativement sur le qui-vive, elle est prête à ajuster son offre et à modifier son organisation en temps réel. Quitte même à changer de business model en cours de route, pour en découvrir un plus performant.
Une entreprise déjà établie, elle, sera moins encline à adopter un mode de test permanent de son offre. Elle travaillera à la mise en place d’une offre ‘’aboutie’’ n’attendant plus qu’à être mise en vente, en évitant de l’éprouver au préalable de l’expérience client.
2- Oser, peut être également faire pareil mais différemment !
♦ C’est voir les choses différemment et les vendre différemment. La démarche marketing d’Apple est fondamentalement basée sur l’audace, la recherche de la différenciation, voire de la disruption.
Elle pense le ‘’coup d’avance’’ : elle amorce le cercle vertueux de l’audace attitude en vue de proposer des produits novateurs. Là où certains voient de la folie, mieux vaut voir du génie, au minimum commercial.
C’est également placer le produit au cœur du mix marketing : il est primordial par ses caractéristiques techniques disruptives, son design, sa qualité, son image véhiculée.
C’est enfin donner un sens à la marque et à son discours fondés sur le ‘’Think different’’. L’axe de la campagne de 1997 est bien le non-respect pour le statu quo, mais le respect pour les fous, les damnés, les rebelles, les faiseurs de troubles…..
Comme le rappelait Steve Jobs, ce qui légitime une telle communication est que la marque évoque par elle-même l’audace car elle a toujours pensé différemment. C’est sa réalité culturelle. La marque ne suit pas les règles établies. Elle interpelle ceux qui sont assez fous pour penser qu’ils vont changer le monde. Elle y est parvenue.
♦ Le phénomène d’ubérisation de l’économie n’est pas prêt de se figer. Ce nouveau modèle économique est établi sur : l’accessibilité, l’instantanéité, la simplicité, les faibles ressources (humaines, financières, structurelles) nécessaires. Il touche des secteurs tels que : transport, voyage, éducation, services à domicile, santé, financement, immobilier, etc….autant dire quasiment tous les secteurs du service.
En réalité, le produit final en lui-même ne change pas. Mais le circuit de distribution et d’information, le mode d’achat, oui. Les Airbnb, booking.com ou Uber ont tenté de vendre un même service mais différemment. L’audace a été de proposer un autre mode de relation commerciale mais sur des secteurs d’activité existants.
Ainsi une réservation de chambre d’hôtel sur une destination lambda est la même que celle réalisée par un canal traditionnel. Mais, par booking.com, l’intermédiaire est une plateforme, le règlement se fait immédiatement.
Une entreprise de services ubérisés propose une nouvelle manière de faire (en interne et en externe) et de communiquer avec son client dans un cadre différent du cadre historique du secteur d’activité.
Conséquences : les rapports de force sont renversés, la mise en relation entre les parties est facilitée et directe.
L’entreprise traditionnelle, elle, est dépassée par le phénomène, ou sur le point de l’être. L’activité classique ne pouvant plus être considérée comme pérenne, le moment est venu pour le manager ou le marketeur de faire preuve d’audace et de prendre le chemin de l’innovation. Car il devient vital pour toute entreprise dans la place d’inventer son modèle économique en cohérence avec ce nouveau monde et avec les (nouvelles) attentes de ses clients. L’enjeu est simple : il en va de la survie de l’activité. L’effort est important : la démarche doit être radicale et le nouveau business model doit être conquérant.
« Dans un monde qui change très rapidement, la seule stratégie vouée à l’échec, c’est de ne pas prendre de risques. » Mark Zuckerberg
3- Oser être opportun en jouant sur le ‘’time to market’’, sur les hasards de l’actualité, sur les faux-pas de la concurrence.
♦ Time to market. A cycle de vie des produits réduit, la réponse de l’entreprise est de prendre l’avantage concurrentiel en compressant le temps de mise au point d’un produit et de son lancement sur le marché.
Oser réduire le temps écoulé entre l’émergence d’une idée et sa commercialisation, c’est parier sur le gain en rentabilité malgré les coûts : coûts de veille, de développement, de production, de livraison express des circuits de distribution et de promotion du nouveau produit. Le tout dans un temps raccourci.
Mais pas seulement : c’est aussi prendre le pari de revoir de fond en comble l’organisation de travail pour repérer les tâches reproduites vainement, les circuits d’information inadaptés et les lourdeurs administratives. La méthode agile facilite d’ailleurs le ‘’time to market’’.
Le jeu en vaut souvent la chandelle : obtention de meilleures marges, surprise des concurrents et saisie d’opportunités de croissance.
♦ Jouer des hasards de l’actualité. C’est oser la polémique. Ou pire, c’est risquer le dépôt de plainte pour diffamation ou abus de droit à l’image, voire même susciter l’indignation pour mauvais goût. Mais le buzz marketing produisant une montée en visibilité de la marque concernée, ce type d’audace est souvent prisé.
◊ Paris, 12 juillet 1998 – « Zizou on t’aime », « La victoire est à nous », « Zidane président’ » « Merci les bleus » : autant d’inscriptions sur l’Arc de triomphe lors de la soirée mémorable de la victoire des Bleus en Coupe du monde de football.
L’agence anglaise gérant le budget communication d’Adidas n’a semble- t-il jamais obtenu l’accord de la mairie de Paris pour ‘’tagger’’ ainsi le monument emblématique. Un fax a bien été adressé …. le samedi de la finale……donc : pas de réponse permettant ou non l’opération ! La double audace a été d’agir sans autorisation administrative et de ne pas associer la marque directement aux slogans affichés. C’est d’ailleurs cette neutralité et les fortes retombées médiatiques sur la ville de Paris qui font que celle-ci ferma les yeux sur l’opération. Quant à la marque, le soir même et longtemps après, la presse relayait le nom du sponsor saluant ainsi son coup de génie. Aujourd’hui encore, nombreux sont ceux capables de le mentionner.
◊ Paris, Janvier 2014 – Le Président Hollande va voir sa belle en scooter. L’occasion est trop tentante pour Drive, société de voiture avec chauffeur (VTC) tout juste créée au cours de l’été 2013. Elle publie une annonce en presse quotidienne et sur Twitter : ‘ »55 Faubourg Saint Honoré – 20 rue du Cirque – 5€ – Ni vu, ni connu – Voiture privée, vitres teintées – A ce prix-là choisissez la discrétion ».
Pour les plus audacieux, la référence présidentielle est flagrante : le vendeur de casques Motoblouz remercie la plus haute autorité de l’Etat d’avoir choisi un casque de sa marque Dexter. « Merci monsieur le Président d’avoir choisi notre casque pour votre protection ». A une autre occasion, le loueur de voitures Sixt, rompu au buzz, toujours dans la référence élyséenne, recommandait de faire « comme Carla Bruni » et « d’opter pour un petit modèle français ».
Même pas peur !
D’autres ont eu moins de chance et ont été condamnés de tant de hardiesse. Ryanair, en 2008, devait indemniser la future première dame de France pour atteinte au droit à l’image. La publicité proposait un cliché d’elle et de son Raymond et lui faisait dire « Avec Ryanair, toute ma famille peut venir assister à mon mariage ».
Le propre de la publicité est aussi de transgresser. Le buz autour de la marque et de son culot étant parfois si élevé que, finalement, les frais de justice semblent insignifiants.
◊ Paris – 08 janvier 2015
L’attaque contre Charlie Hebdo avait suscité le ralliement sous le slogan « Je suis Charlie ». Le site e-commerce Les 3 Suisses se réclamait solidaire du mouvement en intégrant ce slogan dans son nom de marque lors d’un message sur les réseaux sociaux : « Je 3SUISSES Charlie ». Une récupération très osée et particulièrement mal venue. L’audace du ‘’bon mot’’ ne fut réellement pas perçue comme telle. C’est plutôt le manque de sincérité et le sens de la récupération qui déclenchèrent l’indignation de la toile. La justification du site web à montrer son engagement citoyen n’a pas convaincu. Le buzz a une limite : celle du respect de la dignité. La technique du détournement de l’actualité, ou ‘’newsjackingg’’ est simplement incongrue selon certains événements.
Le culot créatif fait mouche lorsqu’il est finement pertinent, pas lorsqu’il est le support d’une quête de viralité sur un événement douloureux.
♦ Faux pas de la concurrence. Rebondir sur une erreur stratégique d’un concurrent qui pensait vous ridiculiser et en profiter pour valoriser un signe distinctif de votre ADN.
Exemple. En février dernier, sur une petite route de campagne, McDonald’s signale (dans une e-vidéo) que le prochain McDrive n’est qu’à 5 km de là, et en profite pour indiquer, par un panneau de 20 m de haut, le trajet à effectuer pour joindre le prochain Burger King, son concurrent, à …. 258 km. Sur le marché du Drive, « McDonald’s est plus proche de vous ».
Seulement voilà, la presse salue l’humour de cette publicité comparative, mais elle n’hésite pas à relever l’erreur stratégique de McDo : mieux vaut pour un leader (1400 restaurants, dont plus de 1000 McDrive) ne pas s’attaquer à un challenger (21 restaurants) par publicité comparative. Voilà de la publicité gratuite pour le petit du burger. Et toc !
Burger King ne s’est pas démonté en proposant une suite au film du leader. Il remercie McDonald’s, « présent partout » en France, car le client y fait juste un stop pour prendre un café et reprendre la longue route le menant au Graal : le fameux whopper BK. Les franchisés Mc Do, jusque-là agacés par les campagnes de BK sur les réseaux sociaux, apprécieront l’effet boomerang…
L’humour décalé de BK est devenu carrément culotté démontrant que la marque n’était pas intimidée par le géant du secteur.
4- Open your mind ou oser en ne suivant pas la ligne prédéterminée.
D’une simplicité déconcertante : ouvrir l’entreprise au monde extérieur, écouter ses clients, faire preuve de curiosité même sur d’autres terrains que le sien, la sort déjà de son cadre confortable et rassurant. Là, l’attendent des éléments déclencheurs de l’audace.
♦ Oser le pas de côté et décaler son regard avec pour objectifs : bousculer les habitudes et réveiller la créativité. C’est ouvrir le champ des possibles en allant voir ailleurs si l’on s’y trouve. Le monde est source d’inspiration. Steve Jobs en était convaincu.
– Pratiquer le benchmark : comparer les habitudes et procédés de l’entreprise aux meilleures pratiques des autres (du même domaine d’activité ou non), c’est s’offrir la possibilité d’en repérer de nouvelles et de se les approprier (après adaptation). C’est avoir le courage de la remise en question pour un manager et de dire « Je sais que je ne sais pas ».
♦ Etre hors de la ligne, voire culotté. C’est ce qu’Hermès réussit avec sa gamme Petit H. Qui aurait pensé pouvoir vendre des produits de luxe avec des chutes de matières. Le laboratoire créatif de la maison re-donne pourtant vie à ces précieuses pièces destinées au rebut. Alors laissées pour compte, elles sont dorénavant transformées par les mains expertes des ateliers en production limitée d’objets insolites.
♦ Thinking outside of the box – OOTB : c’est un processus de réflexion plus innovant et non conventionnel, qui se veut plus créatif. Il peut mener à la rupture, voire la disruption. Sortir de la façon traditionnelle de réfléchir, c’est se poser la question : « Y at-il une autre façon de penser à ce sujet? ». C’est sortir de la facilité : voici les faits, voilà le problème. Listons les solutions 1 et 2 et regardons-les, puis retenons la meilleure. Penser en mode OOTB, c’est aller voir plus loin.
♦ Entretenir la sérendipité ou trouver autre chose que ce que l’on cherchait. En ne se fixant pas d’objectif restrictif, le manager ou le marketeur gardent un esprit disposé à capter les opportunités sur lesquelles rebondir. Ils sont ainsi en état de tenter une nouvelle réponse aux attentes profondes du client.
C’est par ce qu’ils ne connaissent pas la solution idéale au départ d’un problème, mais qu’ils ont le sens de l’audace, qu’une solution meilleure que la précédente ou une solution à un autre problème seront trouvées. Placés en situation de réaliser des expérimentations avec le contexte de l’entreprise, leur curiosité, intuition et chance nourrissent ainsi des prédispositions à éprouver de nouvelles approches.
5- Oser, c’est parfois avoir une vraie vision pour l’entreprise, mais sans maîtriser encore les tenants et les aboutissants.
La capacité à avoir une image de l’entreprise sur le long terme se résume souvent à circuler entre rêve et réalité. Y parvenir, c’est briser les résistances empêchant de passer de l’un à l’autre et penser que l’incertitude peut être source d’opportunités. La vision appelle à l’action : elle aidera à structurer l’entreprise, à bâtir son modèle économique et à adresser un message en interne et auprès des cibles. Avoir une vision en marketing est ambitieux et salutaire. S’il manque au manager ou au marketeur le courage de se projeter, la vision en sera plus difficile à proposer.
On le voit, oser induit de l’engagement, de l’action.
Pourtant, il est possible de bouger les lignes en empruntant d’autres sentiers plus prudents de l’audace en marketing. Retrouvez la suite et fin de notre dossier : Oser en marketing-pourquoi pas, mais….